Les décisions prises par l’Administration doivent être motivées. C’est une obligation qui s’impose presque de manière systématique à l’Administration lorsque celle-ci prend une décision défavorable vis-à-vis d’un administré. Il s’agit pour l’Administration de formuler et préciser de manière exacte les motifs de droit et de fait ayant fondé sa décision. Cette obligation trouve sa base légale dans un loi du 11 juillet 1979. Cette règle ne concerne pas les actes réglementaires mais les actes individuels. Les décisions refusant un titre de séjour en font partie (contrairement aux refus de visa, sauf exception pour certaines catégories de demandeurs, voir précisément article L.211-2).
Par motivation on ne vise pas uniquement l’explication, la raison, ayant justifié la décision négative. On vise surtout la référence à la base juridique sur laquelle s’est fondée l’Administration pour prendre sa décision. Ainsi une motivation qui se contenterait de faire référence à une base légale générale et non précise est illégale (CE, Sect., 24 juillet 1981, Belasri).
Une décision de la Cour d’Appel de Douai est venue récemment préciser la règle en matière de refus de titre de séjour.
M. T., ressortissant guinéen, a fait appel du jugement du tribunal administratif de Lille qui avait rejeté sa demande d’annulation de la décision du préfet du Nord qui avait refusé de l’admettre au séjour et a assorti ce refus d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Les juges de la cour administrative d’appel de Douai ont fait droit à sa demande en considérant que :
« l’obligation de quitter le territoire français dont le préfet peut, en application de l’article L. 511-1 du code l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assortir le refus ou le retrait d’un titre de séjour est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l’ensemble des décisions administratives, par l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ».
Les juges administratifs précisent à ce titre que :
« si la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n’implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d’assortir le refus de séjour d’une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979, il ressort des pièces du dossier, qu’en se bornant à viser le code l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, sans préciser l’article applicable, le préfet du Nord a méconnu cette exigence ; que la décision par laquelle il a fait obligation à M. T. de quitter le territoire français et fixé le pays de destination doit, en conséquence, être annulée ».
Règle à retenir : pour chaque refus de titre de séjour, bien vérifier que la préfecture a correctement visé l’article du CESEDA justifiant le refus de titre (en l’occurrence souvent l’article L.511-1). Si la mention de cet article ne figure pas sur le refus de titre dans son préambule (son visa) alors la jurisprudence de la Cour d’appel de DOUAI doit s’appliquer et le refus, en tant que décision administrative, doit être considéré comme illégal et devra être annulé.
Le législateur a finalement posé le principe selon lequel l’obligation de quitter le territoire n’a pas à être motivée (L. n° 2007-1631 du 20 nov. 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, art. 41, Voir CE, Avis, 19 octobre 2007) mais le refus de titre, première décision intéressant l’étranger doit impérativement être motivée sur la base de la bonne référence du Code des étrangers.
La procédure devra parfois être rappelée à l’Administration…
CAA DOUAI, 10 janvier 2008, n°07DA00970