L’appréciation sévère des ressources et de l’intégration professionnelle du parent d’un enfant en situation de handicap
La naturalisation accordée par les autorités publiques suppose que le ressortissant étranger prouve son intégration dans la société française tant financièrement que professionnellement, y compris le parent d’un enfant en situation de handicap.
En application des articles 21-15 et 24-1 du code civil ainsi que des articles 44 et 48 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, il appartient à l’autorité publique en charge des naturalisations de porter une appréciation sur l’intérêt d’accorder la nationalité française à l’étranger qui la sollicite.
L’Administration prend ainsi en compte, dans le cadre de cet examen d’opportunité, le degré d’insertion professionnelle du postulant ainsi que le caractère suffisant et durable des ressources lui permettant de demeurer en France (Voir en ce sens les circulaires du 16 octobre 2012 et du 21 juin 2013 du Ministère de l’intérieur relatives à l’accès à la nationalité française).
Par conséquent, le recours récurrent aux systèmes d’assistance et les périodes d’inactivité professionnelle trop longues ou trop fréquentes, constituent des motifs d’ajournement ou rejet d’une demande de naturalisation. Rappelons ici que l’ajournement consiste pour l’Administration à geler le dossier de naturalisation de l’étranger pendant un an ou deux ans avant qu’il/elle puisse à nouveau déposer un dossier complètement actualisé.
Cependant, cette appréciation portée par les autorités publiques est bien contrôlée par le juge administratif.
Si dans le passé les juges ont pu se montrer clément sur ces dossiers de naturalisations, les récentes décisions illustrent un certain durcissement des jurisprudences…
Ainsi, la Cour administrative d’appel de Nantes avait considéré en 1999 que le simple fait qu’une mère élève seule son enfant en situation de handicap, auquel elle doit donner des soins qui limitent ses possibilités d’exercer une activité professionnelle normale et qu’elle perçoive des prestations sociales, ne suffisaient pas à justifier un refus de réintégration dans la nationalité française, dès lors que son activité à temps partiel lui procurait des revenus suffisants pour son entretien et celui de son enfant (CAA de Nantes, 22 octobre 1999, N°98NT02769).
Aujourd’hui, la jurisprudence administrative actuelle tend vers une appréciation plus stricte des dossiers. Il convient désormais de démontrer à la fois que les ressources sont suffisantes, plus précisément qu’elles ne sont pas uniquement constituées de prestations sociales et que le parent était dans l’impossibilité totale d’exercer une activité professionnelle normale en raison du handicap de son enfant.
Ainsi, la simple production d’un certificat médical attestant de la nécessité de la présence du parent auprès de l’enfant ne suffit plus à démontrer l’impossibilité de rechercher un emploi ou d’exercer une activité professionnelle, pour des parents qui vivaient principalement de prestations sociales (CAA Nantes, 28 juin 2013, N°13NT00147).
Par ailleurs, si l’état de santé de l’enfant handicapé a pu rendre plus difficile l’insertion professionnelle du parent, cela ne justifie pas l’absence totale d’exercice d’une activité (CAA Nantes, 28 juin 2013, N° 13NT00266) et ne suffit pas à démontrer la nécessité d’une activité professionnelle à temps partiel qui ne lui permet pas de disposer de ressources suffisantes (CAA Nantes, 2 mai 2014, N°14NT00036).
Enfin, on soulignera que l’activité d’auxiliaire familial auprès d’un enfant handicapé ne peut être regardée comme une activité professionnelle pour un parent, même si ce dernier perçoit à ce titre une prestation de compensation (CAA de Nantes, 7 mai 2015, N° 14NT01867).