17, Rue de la Paix 75002 Paris
du lundi au vendredi de 8h30 à 20h

Silence du consul après une demande d’avis du préfet sur un visa : censure du juge administratif de Paris: Avocat immigration Paris

Le préfet commet une erreur de droit en considérant comme une décision implicite de refus le silence gardé par le consul après qu’on lui a transmis la demande de visa de l’intéressé. Le refus de délivrance d’un titre de séjour fondé sur le prétendu refus de délivrance du visa est donc illégal.

TA Paris, 20 mars 2008, no 0719367, M.

Décision :

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PARIS, statuant au contentieux

Lecture du 20 mars 2008, (audience du 7 mars 2008)

no 0719367

M.

M. Errera, Rapporteur

Mme Villalba, Commissaire du Gouvernement

Le Tribunal administratif de Paris,

(1ère chambre)

Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 2007 sous le numéro 0719367, présentée pour M. M., élisant domicile 26 villa d’Este à Paris (75013), par Me Pouly; M. M. demande au tribunal:

1o) d’annuler l’arrêté en date du 22 octobre 2007 pris par le préfet de police par lequel celui-ci:

– lui refuse la délivrance d’un titre de séjour;

– l’oblige à quitter le territoire français;

– fixe le pays de destination;

2o) d’enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard;

3o) de mettre à La charge de l’État une somme de 1 500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative;

Vu l’ordonnance en date du 19 décembre 2007 par laquelle la clôture d’instruction a été fixée au 6 février 2008, en application de l’article R. 775-4 du code de justice administrative;

Vu l’ordonnance en date du 7 février 2008 fixant la réouverture de l’instruction, en application de l’article R. 613-4 du code de justice administrative;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 février 2008, présenté pour l’État par le préfet de police; il conclut au rejet de la requête de M. M.;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 25 février 2008, présenté pour M. M. par Me Pouly;

Vu la décision attaquée;

Vu les autres pièces du dossier;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile;

Vu le code de justice administrative;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 7 mars 2008:

– le rapport de M. Errera, rapporteur;

– les observations de Me Pouly, pour M. M.;

– et les conclusions de Mme Villalba, commissaire du gouvernement;

Considérant que M. M., de nationalité camerounaise, a sollicité la délivrance d’un titre de séjour sur le fondement de l’article L.313-11 4o du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile; que par la décision attaquée, le préfet de police a rejeté sa demande au motif que l’intéressé «ne remplit pas les conditions prévues par l’article précité; qu’en effet, il ne dispose pas d’un visa pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois conformément à l’article L.311-7 dudit code;, que dans la mesure où M. M. est entré régulièrement en France, qu’il atteste d’une communauté de vie de plus de six mois avec sa conjointe, la possibilité lui a donc été offerte de présenter sa demande de visa de long séjour sur place, en vue de l’obtention dudit titre de séjour conformément, à l’article L.211-2-1o du code précité; que celle-ci a été effectuée auprès du consulat de France de son pays d’origine, compétent en la matière; que ladite autorité consulaire a rejeté implicitement la délivrance dudit visa; qu’il ne peut donc pas prétendre aux dispositions de l’article L.211-2-1o précité;» et que «l’intéressé ne justifie pas être démuni d’attaches familiales à l’étranger»; que le préfet de police a assorti cette décision d’une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête:

Considérant qu’aux termes de l’article L.313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile: «Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» est délivrée de plein droit: (…) 4o A l’étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n’ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l’étranger, qu’il ait été transcrit préalablement sur les registres de l’état civil français»; qu’aux termes de l’article L.311-7 du même code: «Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l’octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour «compétences et talents» sont subordonnés à la production par l’étranger d’un visa pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois»; qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article L.211-2-1 du même code, résultant de la loi du 24 juillet 2006: «Le visa mentionné à l’article L.311-7 ne peut être refusé à un conjoint de Français qu’en cas de fraude, d’annulation du mariage ou de menace à l’ordre public.» et que selon le dernier alinéa du même article: «Lorsque la demande de visa de long séjour émane d’un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l’autorité administrative compétente pour la délivrance d’un titre de séjour»; qu’il résulte de ces dernières dispositions qu’elles déterminent que l’étranger peut présenter à la préfecture de son domicile une demande de visa de long séjour et qu’il appartient au préfet d’examiner si le demandeur remplit les conditions fixées et, dans cette hypothèse, de transmettre la demande aux autorités consulaires françaises qui doivent l’examiner compte tenu, notamment, des dispositions du deuxième alinéa de l’article L.211-2-1, relatif à la délivrance d’un visa à un conjoint de Français;

Considérant que M. M. est entré en France le 5 mai 1998, muni d’un passeport revêtu d’un visa Schengen de court séjour et s’est marié, en France, le 14 octobre 2006, avec une ressortissante de nationalité française; qu’il n’est pas contesté que la communauté de vie n’a pas cessé entre eux, qu’elle durait depuis plus de six mois à la date à laquelle l’intéressé a sollicité son admission au séjour et qu’il n’existait aucun élément établissant que le visa sollicité aurait pu être refusé à l’intéressé pour l’un des motifs énumérés au deuxième alinéa de l’article L.211-2-1 précité; que M. M. remplissait donc toutes les conditions fixées par les articles L.311-7 et L.211 -2-1 précités; qu‘en considérant que le consul de France à Douala, auquel la demande de visa de M. M. avait été transmise, avait émis une décision implicite de refus du seul fait qu’il n’avait pas répondu alors que ne lui était demandé qu’un avis, le préfet de police a commis une erreur de droit; que, par suite, M. M. est fondé à soutenir que l’arrêté attaqué du préfet de police auquel il appartenait, soit de délivrer une autorisation provisoire de séjour et de poursuivre l’instruction de la demande, soit de délivrer un visa à l’intéressé, doit être annulé;

Sur les conclusions à fin d’injonction:

Considérant qu’aux termes de l’article L.911-1 du code de justice administrative: «Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution.»:

Considérant qu’il y a lieu, par application de ces dispositions, d’enjoindre au préfet de police de réexaminer la demande de visa de long séjour et de titre de séjour de M. M.;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L.761-1 du code de justice administrative:

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens;

Décide:

Article 1er: L’arrêté du préfet de police en date du 22 octobre 2007 est annulé.

Article 2: Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. M dans le délai de trois mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3: L’État versera à M. M. la somme de 1 000 (mille) euros en application de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4: Le présent jugement sera notifié à M. M. et au préfet de police.

Copie en sera adressée au ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement.
Articles similaires