Cinq cents ans après l’expulsion des Juifs d’Espagne en 1492 par les Rois catholiques, Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon, une loi espagnole en date du 10 juin 2015 autorise désormais les Juifs séfarades à demander la nationalité espagnole. Les exilés avaient fui vers l’Italie, l’Afrique du nord, l’Empire Ottoman, les Balkans ou encore le Portugal. Ce sont les juifs « séfarades » – ce mot signifiant « Espagne » en hébreu – dont la culture s’est répandue ensuite dans toute l’aire méditerranéenne.
Jusqu’à présent, les Séfarades pouvaient solliciter un passeport espagnol de deux manières : soit à l’issue de deux ans de résidence en Espagne, soit par le biais d’une lettre de naturalisation, c’est-à-dire de l’attribution de la nationalité à la discrétion du Conseil des ministres. Ces deux processus nécessitent néanmoins que l’intéressé abandonne tout autre passeport.
L’intention du gouvernement espagnol était dès lors de modifier l’article 23 du Code civil, qui oblige à renoncer à toute autre nationalité. Ainsi, toute personne concernée peut désormais conserver sa nationalité d’origine, alors que l’Espagne prohibe pourtant la double nationalité. Le fait d’être séfarade devient alors une « circonstance exceptionnelle de lien avec l’Espagne » permettant la naturalisation.
Les candidats devront prouver, indépendamment de leur religion ou de leur lieu de résidence actuel, qu’ils sont les descendants de Juifs qui ont été expulsés d’Espagne en 1492 et qu’ils ont encore un attachement aujourd’hui dans le pays par divers documents :
- Un certificat de la communauté juive de la zone ou de la Fédération de Communautés juives d’Espagne, prouvant la condition de séfarade du demandeur
- La production d’une copie intégrale de l’acte de naissance, un extrait du casier judiciaire, éventuellement l’acte de mariage,
- La preuve de la possession d’un nom d’origine clairement sefardi (Toledano, Soriano, Cuenca…) : une « liste » des 5 000 patronymes séfarades concernés a été publiée
- La connaissance du ladino – l’ancienne langue des séfarades – et/ou de l’espagnol et de la culture hispanique, exigence qui pourra être satisfaite dans les trois années à venir lors d’un test de langue auprès de l’institut Cervantès
Ces documents doivent être traduits en espagnol et légalisés ou apostillés.
Le traitement de la demande se déroule en quatre étapes :
- Présentation de la demande et des documents joints à cette dernière par le biais de la plateforme électronique mise en place par le ministère de la Justice.
- Le ministère de la Justice transmet la demande au Conseil général du notariat, qui indique à l’intéressé le numéro de référence de son dossier et lui désigne le notaire devant qui il devra comparaître, en fonction des choix que l’intéressé aura exprimés dans sa demande.
- Après avoir reçu la copie électronique de l’acte de notoriété, la Direction générale des registres et du notariat demande impérativement un rapport au ministère de l’Intérieur et au ministère de la Présidence, puis statue par une décision motivée sur la demande de l’intéressé. Elle doit prendre une décision dans un délai de douze mois. La Direction générale des registres et du notariat adresse d’office une copie de la décision au consulat d’Espagne compétent pour l’enregistrement des naissances
- L’intéressé devra comparaître devant le consulat d’Espagne de son lieu de résidence dans un délai d’un an à compter du jour suivant la notification de la décision. L’intéressé sollicite au consulat l’enregistrement de la nationalité espagnole, fournie un nouvel extrait de son casier judiciaire et effectue les démarches nécessaires en vue de recevoir le passeport espagnol.
Enfin, le demandeur dispose d’un délai de trois ans à compter du 1er octobre 2015 pour déposer sa demande à compter de la publication officielle de la loi.
L’assistance d’un avocat est vivement conseillée pour le candidat séfarade à la nationalité espagnole.