Peut-on engager un référé pour refus de délivrance d’un visa salarié dans le cadre d’une procédure d’introduction de main-d’œuvre étrangère ?
Sur l’opportunité de contester un tel refus
Il faut ici rappeler qu’en raison de la réduction des délais d’instruction des recours introduits devant le tribunal administratif de Nantes les juges sont très stricts sur la notion d’urgence.
Aussi, sauf en cas d’urgence vitale pour l’entreprise, il est très rare qu’un recours en référé puisse aboutir favorablement devant le tribunal administratif de Nantes.
Auparavant, il était possible de tenter :
- TA Nantes, 10 mars 2015, n° 1501572 : « 3. Considérant d’une part, qu’il n’est pas sérieusement contesté que l’absence de Mme M et l’impossibilité consécutive pour M. El M de recruter localement un pâtissier spécialisé dans la confection de pâtisseries orientales sont de nature à mettre en péril le développement de l’entreprise de ce dernier ; que la condition d’urgence doit ainsi, dans les circonstances particulières de l’espèce, être regardée comme remplie » (TA Nantes, 10 mars 2015, n° 1501572).
Aujourd’hui, la jurisprudence est très défavorable :
- TA de Nantes, 6 mai 2024, n° 2406334: le requérant s’est vu opposer un refus de visa de long séjour salarié aux motifs qu’il existe un risque de détournement de l’objet du visa pour mener en France des activités illicites et que les informations communiquées pour justifier l’objet et les conditions du séjour envisagé sont incomplètes et/ou ne sont pas fiables. Une lettre de démission peu circonstanciée, un reçu pour solde de tout compte ne précisant pas les postes occupés et pendant quelles périodes, aucune précision ni justification n’étant par ailleurs apportées quant aux difficultés et au « péril financier » alléguées pour la société. Ces éléments ne sont pas de nature à caractériser une urgence.
- TA de Nantes, 30 janvier 2023, n° 2301131: le requérant s’est vu opposer un refus implicite de sa demande de visa de long séjour salarié. Le fait que son employeur ait obtenu une autorisation de travail à son bénéfice, qu’il soit sans emploi dans son pays d’origine et dans une situation précaire alors que son contrat de travail devait débuter depuis plus d’un mois, l’absence d’éléments permettant de justifier des difficultés auxquelles serait confrontée la société en cause. Ces éléments ne sont pas de nature à caractériser une urgence.
- TA de Nantes, 22 décembre 2022, n° 2216456: la requérante s’est vu opposer un refus de visa de long séjour salarié. Le fait d’invoquer les incidences négatives sur l’activité de son employeur, alors que les éléments comptables retracent une évolution du chiffre d’affaires et une augmentation de celui-ci ne sont pas de nature à établir les difficultés financières mentionnées, les énormes difficultés de recrutement en dépit de diligences effectuées ne peuvent suffire à démontrer que faute d’embauche d’une esthéticienne cette société serait exposée à des préjudices, graves et immédiats sur sa situation économique, les problèmes de santé de la gérante de la société, alors que cette dernière hospitalisée et placée en arrêt de travail ne justifie pas que ces difficultés de santé seraient d’origine professionnelle, le risque de perdre le bénéfice de l’emploi proposé et la situation de précarité financière dans laquelle elle se trouve alors qu’elle ne démontre pas avoir vainement cherché un emploi à Madagascar ni ne pas disposer d’autres sources de ressources. Ces éléments ne sont pas de nature à caractériser une urgence.
- CE, ref. 23 juillet 2010, n° 340199 :La condition d’urgence n’est pas établie s’il apparaît qu’elle résulte principalement d’une situation à laquelle l’action du requérant a contribué. Tel a été le cas pour un demandeur s’étant placé lui-même dans une situation de précarité, en abandonnant son emploi avant d’avoir obtenu un visa, même s’il a reçu un avis favorable pour son installation en France en qualité de salarié, le juge ayant pris en considération les intérêts de l’employeur.
Seule l’appréciation du péril financier de la société employeur du salarié dont on sollicite l’introduction pourrait justifier que des mesures provisoires soient prises et que la décision de refus de visa soit suspendue.
En stratégie, on recommandera souvent de reprendre le dossier en urgence avec un avocat pour le représenter de nouveau au poste consulaire concerné ; En effet, rien n’interdit de redéposer une nouvelle demande de visa mieux justifiée et argumentée avec l’aide d’un avocat.
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