Contrairement aux idées reçues, un français vivant en France ne peut pas toujours se marier à l’étranger devant les autorités consulaires françaises dans le pays de son ou sa partenaire . Prenons un exemple.
Jean-Marc, ressortissant français, souhaite épouser Fatima, ressortissante pakistanaise. Jean-Marc voyage beaucoup et se rend souvent au Pakistan pour affaires. Il connait bien les autorités consulaires françaises au Pakistan. Il envisage de se marier avec Fatima mais ne souhaite pas le faire devant les autorités locales pakistanaises pour raisons personnelles (le plus souvent en raison de convenances religieuses par exemple).
Est-ce que le mariage lui sera possible devant le Consul Général de France à Islamabad ?
Désormais, aux termes de l’article 171-1 du Code civil, « Le mariage contracté en pays étranger entre Français, ou entre un Français et un étranger, est valable s’il a été célébré dans les formes usitées dans le pays de célébration et pourvu que le ou les Français n’aient point contrevenu aux dispositions contenues au chapitre Ier du présent titre.
Il en est de même du mariage célébré par les autorités diplomatiques ou consulaires françaises, conformément aux lois françaises.
Toutefois, ces autorités ne peuvent procéder à la célébration du mariage entre un Français et un étranger que dans les pays qui sont désignés par décret. »
Selon l’article 2 du décret du 26 octobre 1939 concernant les pays où les agents diplomatiques et consulaires sont autorisés à célébrer le mariage d’un français avec une étrangère, ces pays sont :
• Afghanistan
• Arabie Saoudienne
• Chine
• Egypte
• Irak
• Iran
• Japon
• Maroc (Zone de Tanger)
• Oman (Mascate)
• Thaïlande
• Yémen
• Cambodge
• Laos
Le Pakistan n’étant pas sur cette liste, le mariage ne pourra être célébré devant les autorités consulaires françaises.
Est-ce que le mariage pourra être célébré en France ?
Seules restent possibles deux solutions : (1) le mariage devant les autorités locales pakistanaises, ou (2) le mariage devant l’officier d’état civil en France. Pour cette dernière solution, Fatima devra obtenir un visa auprès des autorités consulaires d’Islamabad pour venir se marier en France.
Pour les conjoints de français, on le sait, les autorités consulaires en charge de délivrer les visas ont une obligation de motiver explicitement tout refus, et ces refus ne peuvent être justifiés que par des faits précis et dans des circonstances limitées (le plus souvent pour fraude ou détournement de procédure ou pour trouble à l’ordre public).
Cette obligation de motiver les refus de visa s’applique pour les conjoints de français, mais ici Fatima aurait le statut de « futur conjoint » : les règles ne sont pas les mêmes. Pour ce qui concerne les futurs conjoints de français donc, les obligations susvisées n’existent pas pour l’Administration française et le refus de visa n’a pas a être motivé et justifié.
Reste alors le contrôle d’un éventuel refus au regard des dispositions de l’article 8 de la CEDH. Chaque fois que l’étranger se verra refuser un visa d’entrée, un regroupement familial, une carte de séjour, il pourra invoquer l’article 8 CEDH au respect de sa vie privée et familiale pour faire annuler la décision litigieuse. Les juges communautaires n’ont pas cependant adopté une lecture très protectionnistes des étrangers et la défense du pouvoir discrétionnaire et de la souveraineté des Etats membres restent tout de même prédominant. L’interprétation donnée par le juge administratif français reste dans cette lignée. Mais si Fatima ne reçoit pas son visa, il conviendra alors de contester ce refus car on sait qu’un tel refus ne serait que temporaire et que Jean-Marc finirait bien par obtenir gain de cause en célébrant son mariage devant les autorités locales au Pakistan puis en sollicitant la transcription devant les autorités consulaires sur place avant que le couple ne rentre ensemble en France. Le fait que l’Administration impose la voie la plus longue aux étrangers cache le plus souvent une violation de la loi.